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Share the run, autour du lac...

1 seul tour, 1 lac, 2 pays, 2 jours & 1 nuit, 213km, 29 relais, 9 mates, 1 bus, 1 nuit blanche,

1 expé­rience fantas­tique…

Et un petit film à voir ici, si ça te dit : clic

La RunMate, tu te demandes ce que c’est ? Ben tu prends le plus grand lac d’Eu­rope conti­nen­tale, et tu en fais le tour. En courant… Dur dur…
Pour simpli­fier les choses tu peux aussi te trou­ver des potes, monter une équipe de max 9 coureurs, et te répar­tir les 29 étapes, pendant que les autres suivent dans un bus
Et comme on aime les choses simples, nous on a fait ça. Et du coup je te raconte.

AVANT

Alors la première chose à faire c’est de se trou­ver un capi­taine, pour nous Chris­telle, seule fille du groupe et surtout initia­trice du projet, était une évidence.

C’est ensuite que cela se complique, car il faut orga­ni­ser des réunions apéros, pour se répar­tir les diffé­rentes étapes de la course histoire que chacun ait un kilo­mé­trage plus ou moins équi­li­bré, corres­pon­dant à son niveau, et suffi­sam­ment de temps de pause entre les runs. Je ne vous cache pas que ce plan­ning a été beau­coup plus rapide à faire que l’apéro en lui-même qui s’est longue­ment prolongé. Tout comme les pseu­dos entraî­ne­ments en groupe les 3 lundis précé­dant la course, qui étaient plus l’oc­ca­sion de se retrou­ver, de courir un peu tous ensemble, et de boire quelques bières (le lundi, ça coupe bien la semaine), que de s’en­traî­ner vrai­ment…

PENDANT

Le jour J on se rend au départ à Vevey, avec notre magni­fique camping-car loué, notre stock d’éner­gie offert par PEAK­PUNK all natu­ral no bull­shit inside, et on récu­père les dossards, on se fait un petit apéro (certains ne vont pas courir avant 3–4 heures), et on écoute sage­ment les instruc­tions pendant le brie­fing

Le départ est donné vers 15h15, et c’est Alain qui se lance en premier, pour une petite étape de 5,6 km, mais avec un peu de déni­velé.

Le premier relais se passe sans encombre, et on remarque tout de suite que si tout le monde est là pour rigo­ler, toutes les équipes sont aussi là pour courir, et courir sérieu­se­ment.

Alors on s’y met aussi, et les étapes s’en­chaînent, malgré parfois des petits problèmes de bali­sage. Je cours la troi­sième étape entre Ville­neuve et le Bouve­ret et je traverse le Rhône qui se jette dans le lac, fleuve qu’on retra­ver­sera plus tard, au milieu de la nuit, à Genève, l’autre bout de ce lac, qu’il aura traversé dans toute sa longueur. 

Je tire un peu trop, comme si je n’avais pas toute la nuit à passer éveillé et à courir, et je termine les 7 km et demi au rythme de 4 minutes 33 par km. Dur. C’est pas vrai­ment une allure raison­nable au vu de ce qui nous attend.

À Saint-Gingolph, Capi­taine Chris­telle entame le relais 4 et passe la fron­tière pour entrer en France. Sur ces 10km que l’on crai­gnait le long de la route natio­nale, coincé entre le lac et la montagne, elle découvre de petits chemins et sentiers, soit au pied de la montagne soit au bord du lac. L’or­ga­ni­sa­tion a bien fait les choses à ce niveau-là.

Au relais, sur les quais de Meille­rie, on se boit une bière devant toute l’im­mense éten­due du lac, en l’at­ten­dant. Et quand elle arrive, dans l’eu­pho­rie du moment, Chris­telle détache sa banane conte­nant son télé­phone, au lieu de déta­cher la cein­ture conte­nant la balise et le dossard, et du coup Stéphane part avec le télé­phone de Chris­telle au lieu de la bali­se… Fou-rire géné­ral, jusqu’à ce qu’on se dise qu’il faudrait peut-être sprin­ter pour rattra­per notre coureur et lui filer la bali­se…  

Surtout qu’il s’at­taque à l’étape avec le plus gros déni­velé, dont une grosse montée qui fait partie d’un des défis inter­mé­diaires de la course.

Alors que le soleil commence à se coucher lente­ment, on pique-nique au point-relais suivant, dans les hauts de Lugrin, sur une table de ping-pong, en atten­dant notre coureur. Pain, viande séchée, lard, salami, fromages, … pas le vrai repas de runner, mais on s’en fout… d’ailleurs on trouve que ça manque quand même de vin rouge

Au relais suivant, à Évian, le ciel devient orange tout à l’ouest, tout là-bas vers ce bout du lac qu’il faut atteindre.

Fron­tale et gilet de sécu­rité pour Alain qui prend le premier relais qui va se termi­ner de nuit. Dans le bus, étran­ge­ment la fatigue se fait sentir, et il faut avouer que la consom­ma­tion de bière dimi­nue un petit peu. Longue attente dans la nuit, à la plage de Thonon. Il devient diffi­cile de s’orien­ter et Alain s’est un peu perdu, ce qui l’a ralenti. Roberto se lance dans une étape plate, le long du lac, mais sur des sentiers, et des galets, pas évidents à fran­chir à la fron­tale sans trop ralen­tir le rythme.

Puis ce sont David, Stéphane, et Alain qui se succèdent le long de la côte française. Chris­telle est de plus en plus inquiète à l’idée de prendre son relais, et de savoir qu’elle va se retrou­ver seule en forêt dans la nuit noire, mais elle y va, et fina­le­ment on la retrou­vera entière, au relais suivant, soula­gée de n’avoir rencon­tré ni sangliers, ni rôdeurs

Lionel se perd dans l’étape suivante, se tape 1km de plus que prévu, et repasse la fron­tière pour entrer à nouveau en Suisse, juste avant de me passer le relais pour l’étape 15. Il y a du vent, il fait froid, il est 0h41, j’ai pas la grosse éner­gie, et c’est clai­re­ment pas des heures où j’ai l’ha­bi­tude de courir… mais bon, faut y aller, alors on y va… 

Quelques champs de maïs, enfin je crois, en légère montée, puis un petit bout de forêt, et je retrouve le bitume, dans les quar­tiers cossus à l’est de Genève. Je me sens bien, les jambes tournent, c’est parfait, la lassi­tude est passée… 

Les portails de villas se succèdent, et j’ai un bon rythme. En même temps, je n’ai aucun mérite, c’est un faux-plat descend sur toute la 2ème partie de l’étape. Je retrouve le bord du lac à Genève, au Port-Noir, et je passe le relais.

Et le coup de barre du début de soirée est passé chez tout le monde, et on a tous une super pêcheLa nuit n’a qu’à bien se tenir, les urbi­run­ners sont là ! !

 

C’est main­te­nant à Hervé que revient la tâche primor­diale de contour­ner le lac, et de nous faire reprendre cap à l’est, en prenant le virage prin­ci­pal, en épingle, en retra­ver­sant le Rhône, au coeur de Genève.

Au relais, une habi­tante du quar­tier distri­bue cafés et thés aux coureurs, ça fait du bien, un peu de chaud. 

Robi s’at­taque à l’étape 17, Stéphane, David, et l’autre Stéphane conti­nuent à travers la nuit. Le camping-car suit, personne ne dort vrai­ment, car entre les trajets et les relais, le coureur qui se prépare, celui qui vient de termi­ner qui se change et se ravi­taille (salades de pâtes, barres éner­gé­tiques PEAK­PUNK, etc., on n’a pas trop le temps de flâner en fait…


tu veux goûter du Peak­Punk ? clique sur l’image :-)
 

Je prends mon 3ème relais à Pran­gins. Il est 4h10 du matin lorsque je m’élance, tota­le­ment seul, dès que je quitte le point relais et que les encou­ra­ge­ment des mates se perdent dans la nuit noire. Je cours en pleine forêt, sur un tout petit sentier. Heureu­se­ment que ma lampe fron­tale est assez puis­sante, et que je vois de loin en loin les balises s’illu­mi­ner, sinon il ne serait vrai­ment pas évident de s’orien­ter. C’est fou de se retrou­ver là, seul dans la nuit à courir dans des lieux tota­le­ment incon­nus. D’ailleurs je ne sais pas vrai­ment où je suis, moi le maniaque des cartes et de l’orien­ta­tion… C’est même assez grisant. Je traverse quelques villages tota­le­ment endor­mis, un verger, puis à nouveau la forêt. Le silence est total, trou­blé simple­ment par le bruit de mes pas et mon souffle. La nuit est complète, et le monde entier se réduit au simple halo de ma fron­tale. Je vis un run hors du commun et je jouis de chaque instant… Magique.

9.8km plus loin, je passe le relais à Chris­telle, qui s’élance dans la nuit pour la 2ème fois. Lionel pren­dra l’étape suivante (et se perdra enco­re…ou peut-être a-t-il tenté de tricher (les experts se tâtent encore) avant qu’on le remette dans le droit chemin), et on l’at­tend à Aubonne où un ravi­taille­ment plus consis­tant est servi, alors que l’obs­cu­rité dimi­nue lente­ment : crois­sants, thés, cafés, céréales… Ca réchauffe, et l’am­biance est toujours aussi sympa… 


non de dju, puisque j’vous dis que j’ai pas voulu tricher…

Stéphane verra le jour se lever douce­ment, en venant me passer le relais à Morges

J’ai beau­coup de peine à me moti­ver à sortir du bus, et mes premiers pas dehors, dans le froid de l’aube, sont plutôt pénibles et raides… Je m’échauffe et m’étire un peu en l’at­ten­dant, et tout se décoin­ce…

Ma 4ème et dernière étape est courte, tota­le­ment le long du lac, entre Morges et Préve­renges. Aucune diffi­culté, et c’est ma dernière en plus, alors j’en profite : le soleil se lève derrière les Alpes et vient cares­ser l’im­men­sité du lac à ma droite et devant moi, les couleurs sont sublimes, un moment magni­fique. 

Je n’ar­rive pas à mettre toute la vitesse que je voudrais dans ce petit run, mais peu importe, je profite. C’est beau, c’est calme, incroya­ble­ment paisible, serein… mais je me réjouis de retrou­ver les encou­ra­ge­ment bruyants de mes mates au prochain relais… après un total person­nel de 28km… Et ils sont là, Hervé prêt à prendre la suite, les autres applau­dis­sant et criant sous leurs capuches ou enrou­lés dans une couver­ture… 

Nous sommes main­te­nant 4 à en avoir terminé avec nos relais, et c’est l’heure du petit-déj, qui en fait est un apéro : chips et bières avant 8h un dimanche matin ça m’était jamais arrivé. Mais presque rien dans les dernières 15 heures n’était déjà arrivé… C’est un dimanche matin unique, on en profite tous, que ce soit sur la route ou dans le camper…

Le relais suivant passe de Hervé à Robi, sur la piste bleue du stade de Vidy où me reviennent en mémoire les souve­nirs bruyants et exal­tants des arri­vées des 20km de Lausanne dans une belle ambiance festive, bien diffé­rente de ce petit matin calme… L’ar­ri­vée est encore loin, même si nous avons déjà couru ensemble 187km

Puis c’est au tour de Stéphane de prendre son dernier relais, tout au bord du lac, qui brille main­te­nant sous le soleil. C’est ardu pour lui, la chaleur est là main­te­nant, et il doit grim­per dans le vignoble, certes magni­fique et classé au patri­moine mondial de l’UNESCO, mais très pentu, jusqu’à Cully. Il donne tout, et termine exté­nué, mais des étoiles plein les yeux.

Et c’est David qui part, pour le dernier relais. Long de plus de 12km et mal plat, c’est dur, mais il assure comme un chef. 

On l’at­tend à 2–300m de l’ar­ri­vée à Vevey, pour passer la ligne d’ar­ri­vée tous ensemble.

Moment génial, la course à pied n’est plus un sport indi­vi­duel, c’est une vraie équipe qui passe la ligne, qui a relevé le défi, peu importe les temps de chacun, on n’a qu’un seul résul­tat en tête : on a terminé, on a couru et on a ri. Et ça vaut large­ment toutes les médailles du monde.

Il nous aura fallu 19h37 pour en termi­ner. On est très content, 22èmes sur 133 équipes “team” et 35èmes sur 168 au géné­ral (qui inclus les ultras, à savoir les équipes de moins de 6).

APRES

Magni­fique ambiance dans la village d’ar­ri­vée… La fatigue ne se fait pas encore trop sentir, les bières passent bien, le lac est beau, infini, et c’est vrai­ment diffi­cile de conce­voir qu’on vient d’en faire le tour… en courant… et que chaque mètre autour de ce lac a été couru par l’un de nous…

Dans l’après-midi, la fatigue s’im­pose violem­ment chez tout le monde, lorsque nous rentrons chez nous, et j’avoue que je n’ar­rive plus trop à appré­cier…

Mais après une bonne et longue nuit de sommeil, les souve­nirs reviennent et le plai­sir est là. Le plai­sir de l’effort partagé, de la soli­da­rité avec presque tous les mates qui sont là à chaque relais pour encou­ra­ger l’ar­ri­vant et le partant, peu importe l’avan­cée de la nuit, sans comp­ter ces moments uniques et secrets, que chacun a vécu seul et que personne ne peut vrai­ment racon­ter, ni parta­ger, dans la nuit, quelque part seul, au rythme de sa foulée… 

Chacun à sa façon, tous ensem­ble…

POUR CONCLURE

Une expé­rience magique, qui quelques jours après, la fatigue passée, ne laisse fina­le­ment que l’en­vie de recom­men­cer… 

Et qui m’a appris des trucs :

*le tour d’un lac c’est pas si plat, les orga­ni­sa­teurs ont concocté des étapes très variées, et au final, c’est 2500m de D+ qui y sont passé, entre étapes roulantes, mini­trails, forêts, et vignobles escar­pés…

*cou­rir seul en forêt en pleine nuit, c’est génial

*qu’on peut passer une nuit entière à côté de Robi sans qu’il ronfle (en même temps, il suffit qu’il ne dorme pas)

*que le même Robi n’a aucune odeur corpo­relle

*que nous autres oui

*que courir est un sport d’équipe ! Team urbi­run, powe­red by fun and Peak­Punk all natu­ral

*qu’à notre âge il est beau­coup plus facile de récu­pé­rer de ce genre de nuit blanche que d’une gueule de bois…

PS : et autour de ce lac, il y a des parcours urbi­run à Genève, et à Lausanne, n’ou­blie pas…

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